Histoire d’un ruisseau par Elisée Reclus.
Cet ouvrage, à cheval entre l’essai et la fiction, a été écrit en 1869 par Elisée Reclus (1830-1905). Ce géographe et figure pionnière de l’écologie nous emmène ici au gré des pages au creux de méandres, tourbillons et remous, partout où voyage le grand circuit des eaux.
Le livre commence ainsi: « L’histoire d’un ruisseau, même de celui qui naît et se perd dans la mousse, est l’histoire de l’infini » et se termine par cette phrase quasi ésotérique : « (…) réunis en un seul flot, nous descendrons ensemble vers la grande mer où toutes les vies vont se perdre et se renouveler. »
En décrivant les phénomènes et les paysages au fil d’un ruisseau depuis la source jusqu’à l’océan, Elisée Reclus nous fait voyager et nous rappelle également la fragilité et la vacuité de nos vies humaines. En comparant l’homme ou la société toute entière à l’eau qui s’écoule, l’auteur parle du corps humain qui vit, s’affaisse et se dissout dans les éléments tandis qu’à l’autre bout de la Terre un enfant nait, sortant de « l’immensité des choses » comme on naitrait d’une source.
Ce grand circuit des eaux ne serait-il pas la métaphore de nos vies ? Le symbole d’une certaine forme d’immortalité ?
En écrivant sur l’eau qui danse jusqu’à la mer, Elisée Reclus fait également en filigrane une ode à l’impermanence de la vie et à la nécessité d’être au présent, il fait d’un ouvrage de géographie romancée un traité à peine déguisé de philosophie du soi. Nous le citerons ainsi pour terminer quant à la presque fin de l’ouvrage il écrira : « Semblables au ruisseau qui s’enfuit, nous changeons à chaque instant; notre vie se renouvelle de minute en minute, et si nous croyons rester les mêmes, ce n’est que pure illusion de notre esprit. »